Prestation de Compensation du Handicap (PCH) : Attention à l’Ubérisation de l’aide à domicile

Paris, le 30 décembre 2021

Alors que l’avenant à la convention collective des salariés du particulier employeur et de l’emploi à domicile sera applicable à l’ensemble des particuliers employeurs et leurs salariés à partir du 1er janvier, la Fédésap demande au Gouvernement d’être vigilant à un potentiel nivellement par le bas de l’aide et de l’accompagnement à domicile des personnes en situation de handicap. Afin d’assurer une même qualité de prestation qu’à travers le recours à un service prestataire d’aide à domicile, l’attribution de la PCH en « Emploi direct » doit être conditionnée au fait que le salarié dispose d’un diplôme ou d’une formation l’habilitant à exercer cet emploi.

Une telle obligation existe déjà pour les assistantes maternelles employées par le particulier employeur. Celles-ci doivent être agréées par le Conseil départemental après avoir suivi une formation de 120 heures ou être titulaires du Certificat d’Aptitude Professionnelle (CAP) « Accompagnement éducatif petite enfance ».

Dans le cas des personnes en situation de handicap vivant chez elles, une telle conditionnalité se justifie pleinement. Ce sont des personnes vulnérables dont le salarié doit assurer l’autonomie et garantir la sécurité. En outre, la PCH Emploi direct est entièrement financée par des deniers publics. C’est pourquoi une procédure d’agrément, mise en œuvre par le Conseil départemental, devrait viser à vérifier la motivation du salarié pour le métier d’accompagnant, ses capacités et ses compétences pour l’exercer.  

Selon M. Amir Reza-Tofighi, Président de la Fédésap, « cette demande s’inscrit dans une démarche plus globale en vue de l’élection présidentielle de 2022, où la 1ère fédération d’entreprises de Services à la Personne et de la filière du domicile souhaite proposer aux candidats l’obligation de recourir à du personnel diplômé ou qualifié, dès lors que le bénéficiaire est en situation de vulnérabilité et perçoit un financement public, sous la forme d’une allocation ou d’un crédit d’impôt ».

Un arrêté pris par la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, en date du 6 octobre 2021, étend la convention collective nationale de la branche du secteur des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile, négociée par la FEPEM et les syndicats des salariés concernés, à l’ensemble des particuliers employeurs et de leurs salariés à partir du 1erjanvier 2022. Cet arrêté va augmenter le coût de l’emploi du salarié à domicile et les restes à charge des quelque 85 000 particuliers employeurs en situation de handicap. Certaines cotisations sont augmentées (prévoyance, fonds dialogue social…), de nouvelles sont créées (ex : cotisation de la santé au travail) et certaines majorations nouvelles, concernant des jours fériés et la présence de nuit, sont appliquées.

C’est pourquoi les associations de soutien des personnes en situation de handicap appellent unanimement les pouvoirs publics à revaloriser le tarif de la PCH en emploi direct de 40%, et de le porter à 170% du salaire minimum conventionnel d’un assistant de vie au lieu des 130% en vigueur.

Le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH) a adopté, le 19 novembre dernier, une motion dans ce sens, relative à l’impact de la nouvelle convention collective sur les emplois à domicile.

La PCH à domicile liée à un besoin d’aide humaine peut être organisée en emploi direct ou en mode mandataire. En emploi direct, le calcul du tarif horaire de la PCH est effectué sur la base de 130% du salaire horaire brut d’un assistant de vie C (ou D dans le cadre de la délégation de gestes de soins), tel que prévu dans la convention collective nationale des salariés du particulier employeur. En mode mandataire, le tarif de la PCH est majoré de 10%, permettant ainsi aux particuliers employeurs de financer les frais de gestion facturés par la structure mandataire.

La Fédésap estime qu’une revalorisation à 170% du salaire minimum conventionnel d’un assistant de vie C est déconnectée des coûts réels liés à l’emploi direct et ne devrait donc pas se faire sans aucune contrepartie. Cette revalorisation devrait, au contraire, s’accompagner de la professionnalisation des salariés du particulier employeur, au travers de la reconnaissance des diplômes et des tâches dans les minima hiérarchiques conventionnels.

« En l’état, cette motion, si elle devait être suivie par le Gouvernement, porte les germes d’une potentielle ubérisation de l’accompagnement de la personne en situation de handicap. Aucune obligation n’est faite à l’employeur particulier de mieux rémunérer son salarié y compris avec cette éventuelle augmentation de la PCH « emploi direct ». Il avantagerait pourtant le recours à ce mode d’intervention alors que ce dernier ne garantit pas à la personne aidée le même niveau de sécurité, d’accompagnement et de protection que celui proposé par les services autonomie. Cette question épineuse de la structuration de l’emploi direct comme modalité d’intervention auprès des personnes fragiles doit être traitée rapidement pour garantir des mêmes droits à tous les Français. C’est une priorité pour la Fédésap. » déclare M. Amir Reza-Tofighi, Président de la Fédésap.

La révision de la méthode de détermination du montant de la PCH demandée par le CNCPH doit constituer une opportunité pour instituer un minium d’exigence qualitative qu’est en droit d’attendre une personne en situation de handicap.

En effet, contrairement au service autonomie ou aux organismes de Service à la Personne mandataires, aucune garantie n’est apportée aux personnes recourant à l’emploi direct sur les compétences, les diplômes, l’expérience de ses salariés. En outre, force est de déplorer que le contrôle d’effectivité qui prévaut pour l’activité prestataire n’est pas déployé en emploi direct ni en mandataire.

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