Circulaire du 11 avril 2019 : l’administration fiscale entend raboter les crédits d’impôt des Services à la Personne !

Face à la décision arbitraire, unilatérale et sans aucune habilitation législative de l’administration de modifier la réglementation du secteur SAP, la Fédésap demande à la DGE et à la DGFIP de revoir très vite leur copie, sous peine d’une action juridique plus musclée.

Suite à la publication d’une circulaire[1] de l’administration le 11 avril dernier (voir notre CP du 13 mai 2019), revenant sur la notion « de condition d’offre globale de services » pour certaines activités de Services à la Personne et sur celle du « domicile », les représentants du secteur des SAP, dont la Fédésap, ont demandé des explications complémentaires à la DGE. A l’issue d’une réunion de concertation qui s’est tenue le 20 mai avec la DGE et malgré les arguments juridiques et économiques légitimes tenus unanimement par les représentants du secteur, la Fédésap s’est entendue confirmer que l’administration maintiendrait son texte en l’état.

Une atteinte grave au principe de séparation des pouvoirs, un ministre ne pouvant se substituer au parlement !

Pour rappel, cette inquiétante circulaire, en dehors de tout autre texte de loi, écrite et publiée sans concertation préalable et sans connaissance réelle du terrain, vient totalement changer la donne concernant l’offre classique des 26 services de SAP existants et ce, rappelons-le, sans qu’il soit du pouvoir d’un ministre de venir modifier une législation qui reste de la seule compétence du pouvoir législatif.

Outre qu’elle ne prend pas en considération des milliers d’entreprises qui pourront être gravement affectées dans leur activité, voire disparaître et faire perdre des centaines de milliers d’emplois par la même occasion, le texte vient raboter en toute discrétion les crédits d’impôt dont peuvent bénéficier les contribuables utilisateurs de SAP.

En effet, elle prévoit que le contribuable, donc la personne, devra consommer plusieurs services pour pouvoir bénéficier du crédit d’impôt. La notion « d’offre globale de service », qui était jusque-là définie sur la structure, sera aujourd’hui aussi appliquée à la personne.

Désormais, cette condition d’offre globale de service est imposée au consommateur pour bénéficier d’un crédit d’impôt alors que le législateur n’impose cette condition exclusivement que pour l’application d’un taux de TVA réduit.

La Fédésap demande une nouvelle réunion de concertation avant d’autres recours

Quant à la nouvelle restriction apportée à la notion de « domicile » au point I-8.1 de la circulaire du 11 avril 2019, elle a pour conséquence que les bénéficiaires de la PCH ou de l’APA, qui font appel à des prestations d’aide à la personne dans le cadre de ces allocations, ne peuvent plus bénéficier de crédit d’impôt ni d’un taux de TVA réduit dès lors qu’ils séjournent temporairement dans une résidence dont ils ne sont pas propriétaires.

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EXEMPLES CONCRETS D’APPLICATION DE LA CIRCULAIRE DU 11 AVRIL EN L’ETAT

CAS N°1 / Un couple de personnes âgées bénéficiaires de l’APA respectivement GIR 2 & GIR 3. Depuis de nombreuses années, ils séjournent en villégiature trois semaines en été. Dépendants, quels que soient leurs lieux de séjours, ils continuent à bénéficier de leur plan d’aide et plus particulièrement de l‘intervention d’une auxiliaire de vie.

Avec cette nouvelle circulaire, désormais :

  • Si ce couple séjourne trois semaines dans leur résidence secondaire :
    • Leurs dépenses pour l’intervention de cette auxiliaire de vie ouvrent droit pour l’entreprise qui réalise l’intervention à appliquer à leur prestation un taux de TVA à 5,5%, et pour un eux de bénéficier d’un crédit d’impôt à hauteur de 50% des sommes dépensées.
  • Si ce même couple séjourne trois semaines dans une location saisonnière :
    • Leurs dépenses pour l’intervention de cette auxiliaire de vie n’ouvrent plus droit pour l’entreprise qui réalise l’intervention à appliquer à leur prestation un taux de TVA réduit à 5,5%, désormais la TVA sera à un taux de 20%, et aucun crédit d’impôt !

Dans le second cas, cela représente pour eux une augmentation de 65% : une telle augmentation ne leur permettra plus de séjourner ailleurs que dans leur domicile.

CAS N1 bis / Ce même couple accueille leurs petits enfants pendant des vacances d’été. Jusqu’à présent, au regard de leur dépendance, ils avaient recours à une prestation de garde d’enfants pour les accompagner, leur état ne leur permettant pas d’assumer des activités de plein-air avec leurs petits-enfants :

Désormais avec cette nouvelle circulaire :

  • Si ce couple séjourne trois semaines dans leur résidence secondaire :
    • Leurs dépenses pour une garde d’enfant ouvrent droit pour l’entreprise qui réalise l’intervention à appliquer à leur prestation un taux de TVA a 10%, et pour un eux de bénéficier d’un crédit d’impôt à hauteurs de 50% des sommes dépensées.
  • Si ce même couple séjourne trois semaines dans une location saisonnière :
    • Leurs dépenses pour une garde d’enfant n’ouvrent plus droit pour l’entreprise qui réalise l’intervention à appliquer à leur prestation un taux de réduit, une TVA à 20% sera donc appliquée, et aucun crédit d’impôt !

CAS N°2 / Madame Oustau a perdu son époux en 2018. Sa pension de réversion, modeste, ne lui permet aucun écart budgétaire. Pour autant, elle pouvait faire appel à une structure de Services à la Personne pour une prestation d’accompagnement véhiculé afin qu’elle puisse se rendre à ses rendez-vous médicaux mensuels et faire des courses, vu qu’elle réside dans un hameau. Cela grève normalement son budget de 50 €.

Avec la circulaire du 11 avril, vu qu’elle ne consomme pas d’autre Service à la Personne, son accompagnement véhiculé indispensable en raison de sa pathologie, n’ouvrira plus de droit à un taux de TVA réduit ni un crédit d’impôt ! Cela représente une dépense supplémentaire de 31,27 € par mois, soit 382 € par an.

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La Fédésap est étonnée et très déçue d’un tel manque de discernement de l’administration fiscale. Cependant, la Fédésap ne s’avoue pas vaincue et demande une nouvelle réunion de concertation et d’éclaircissements du texte de la circulaire avec les services concernés, d’autant plus que la DGFIP, absente le 20 mai, est décisionnaire et partie prenante sur ce sujet.

Mais si les deux administrations ne souhaitaient de pas de revenir sur le texte et s’entêtaient malgré tout, la Fédésap, pourrait, en concertation avec les autres représentants du secteur, recourir à des moyens juridiques plus énergiques. Mais avant d’exercer une force toute légitime, la Fédésap espère faire revenir à la raison nos référents fiscaux.

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[1] Circulaire du 11 avril 2019 NOR : ECOI1907576C relative aux activités de services à la personne : déclaration et agrément des organismes de services à la personne.

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